(...)Quelles qu'en soient ses origines, la juridiction capitulaire se traduit par un pouvoir de direction g�n�rale de la sauvet� et par un pouvoir de contr�le et de police sur toutes les activit�s. L� encore, les textes du moyen �ge renseignent mal sur l'exercice de cette juridiction. Les pr�rogatives immunistes sont d'abord judiciaires, le chapitre exer�ant la pleine justice sur les clercs et les la�cs. C'est �galement une zone franche pour le commerce des denr�es qui �chappent � la fiscalit� municipale ou royale. Les habitants sont aussi soustraits aux devoirs militaires et ne participent pas � la d�fense de la ville. Mais on ne sait, en revanche, si le chapitre r�clamait des droits seigneuriaux sp�cifiques aux habitants � l'�gal de ceux qu'exigeait son homologue de Saint-Seurin qui pr�levait une poule � No�l, des droits sur la vente de vin au d�tail et exigeait caution. Les nombreuses mentions de "g�lines" associ�es au cens vers� par les maisons de la sauvet� Saint-Andr� pourraient sugg�rer un pr�l�vement identique. Ce sont principalement les textes de l'�poque moderne qui informent sur les modes d'administration du chapitre; celui-ci d�lib�re alors in communi sur les mesures � prendre et en d�l�gue ensuite l'application � des officiers la�cs. Le premier d'entre eux est le juge de la sauvet�, nomm� pour un an et renouvel� parfois � vie. Il est assist� d'auxiliaires: pr�v�t, greffiers et sergents. Ensemble, ils doivent rendre la justice et assurer la police dans la sauvet�. Ils ne disposent pas d'un b�timent sp�cifique et officient dans la clo�tre du chapitre. La manifestation la plus voyante et la plus classique de la juridiction capitulaire reste le pilori et le carcan install�s sur la place saint-Andr�.
Ce pouvoir de ban est doubl� d'une assise fonci�re. Le chapitre se veut, en effet, l'unique seigneur foncier de la sauvet� et il est vrai qu'il n'a gu�re de concurrents, le principal �tant l'archev�que qui d�tient notamment des possessions (15 tenures) dans la rue Saint-Andr� (des Trois-Conils), ainsi qu'aux limites de la sauvet�: rue de Saugars (rue de Cheverus) non loin du puits Saint-Gemme et pr�s de l'enceinte (subtus muro). Les droits fonciers du chapitre peuvent �tre scind�s en deux entit�s: d'une part un noyau, issu de la mense canoniale, sous la directe du chapitre et compos� des maisons canoniales et des b�timents communs; d'autre part, des tenures accens�es: le recensement effectu� en a comptabilis� 132 mouvantes de Saint-Andr�-auxquelles il faudrait ajouter les 25 relevant de l'archev�que soit un total de 157 tenures-situ�es dans la sauvet� ou � sa p�riph�rie imm�diate. Ce nombre n'a qu'une valeur d'�chantillon d� au hasard des sources disponibles, mais il conforte la vision d'une assise fonci�re du chapitre importante au regard de la faible superficie concern�e; il dit aussi que les chanoines ont eu recours au faire-valoir indirect pour une large part de leurs possessions au sein m�me de la sauvet�. C'est l� un mode de gestion du temporel commun aux autres seigneurs eccl�siastiques de Bordeaux qui n'ont conserv� que des r�serves tr�s r�duites. Les chanoines de Saint-Andr� n'y d�rogent pas, m�me pour ce qui constitue le coeur m�me de leur seigneurie. Ces droits fonciers sont �troitement m�l�s aux droits banaux et proc�dent du m�me dominium exerc� par le chapitre cath�dral sur et � partir de la sauvet�. Il a fait de celle-ci un territoire r�serv� o� il entend �tre le seul ma�tre, m�me au d�triment de son sup�rieur, l'archev�que de Bordeaux.
La d�limitation de la sauvet� Saint-Andr� a �t� conflictuelle d�s la p�riode m�di�vale, mais les querelles se sont accrues � l'�poque moderne, suscitant une intervention royale dans les ann�es 1760-1761, aboutissant � un bornage officiel le 1er avril 1761 (fig.9).
1-En recoupant une bulle de Jean XXIII en 1412, des �l�ments de son testament de 1456-1457 et des bribes qui subsistent de l'enqu�te canonique de 1464, on peut avoir une id�e des origines et de la jeunesse de Petrus Berlandi. D�j� pr�tre vers 1406 et secr�taire du cardinal Uguccione (576), Pey Berland a d� na�tre avant 1380. Son p�re poss�dait des tenures de belle ampleur sur la seigneurie de Sainte-Croix en M�doc, dans les paroisses de Soussans, Margaux, Moulis et Avesan, celle-ci �tant la r�sidence de la famille et le lieu de naissance du futur archev�que. Il �tait fils unique, aux dires de son dernier secr�taire L�onardus de Segoniis, n� vers 1416, entr� au service de l'archev�que vers vingt ans et devenu son secr�taire vers 1437. Ce t�moin n'a connu ni le p�re ni la m�re de Pey Berland, ni son parrain ni sa marraine, mais se souvient que l'archev�que a fait exhumer la d�pouille de sa m�re du cimeti�re de Moulis pour la faire enterrer dans l'�glise. Dans son testament, Pey Berland cite un consanguineus qui est son homonyme et surnomm� "Forthin", ce proche parent est principalis in domo paternali (sua). Ce d�tail sugg�re une communaut� familiale complexe.
2-D'apr�s son testament, il a re�u ses premiers rudiments d'instruction de ma�tre Raymond de Bruges, un notaire du voisinage; il �voque aussi le souvenir de l'�pouse de cet homme. Entre l'apprentissage de la lecture et de l'�criture dans une bourgade du M�doc et l'universit� de Toulouse, o� Pey Berland conquiert le grade modeste de bachelier en d�cret, il y a un vide qu'il serait imprudent de remplir automatiquement par l'�cole cath�drale. Pey Berland a gard� le go�t des livres: son testament �voque ceux qu'il a copi� de sa main. Plus tard, le chapitre fit faire des recherches � Toulouse pour en savoir plus sur la p�riode de ses �tudes, mais en vain. Fils d'une famille sans lustre mais ais�e, Pey Berland n'a pas �t� pouss� vers le clerg� comme un cadet r�duit aux seconds r�les, il a d� choisir de devenir eccl�siastique et il a eu les moyens de faire des �tudes; aucun document ne fait allusion � des bienfaiteurs ni � un s�jour dans un coll�ge. Son parcours initial est �tonnamment proche de celui de Nicolau de Gibran (140), d'une bonne dizaine d'ann�es son cadet: ce fils de notaire bordelais est all� �tudier � Toulouse d'o� il est revenu bachelier en droit canon.